RGPP, Révision Générale des Politiques Publiques

18
Avr
2008

Lors du débat sur la Révision générale des politiques publiques, j’ai répondu au Premier ministre qui  dans son intervention fustigeait le laxisme d'une gauche qui aurait dilapidé  les fruits de la croissance et dépensé sans compter :

« Où étiez vous monsieur le Premier ministre entre 2002 et 2007, quand la France a augmenté sa dette de dix points de PIB, quand nos déficits ont dépassé la norme de 3 % tandis que les dépenses publiques et les prélèvements obligatoires augmentaient ? N’étiez-vous pas au Gouvernement ?

(…) La révision générale des politiques publiques aurait pu être une réflexion intelligente s'appuyant sur les audits de modernisation pour dégager des économies dans certains secteurs et redéployer les crédits dans d’autres. Mais vous avez transformé cet exercice en un plan de rigueur aveugle et brutale,

(...) Si vous aviez appliqué les principes d'une révision des politiques publiques au paquet fiscal de 15 milliards d’euros, vous n’en auriez retenu aucune des mesures !

La RGPP, c’est en réalité une Rigueur Généralisée Pour le Peuple, mais pas pour les plus fortunés de nos concitoyens qui ont bénéficié des cadeaux de l’été.

 

 

 

M. le président.La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, mes chers collègues, je tiens à remercier le groupe UMP pour ce débat sur la politique de rigueur,…

M. Jean-François Copé.À votre disposition !

M. Pierre-Alain Muet. …qui nous aura permis d’entendre le Premier ministre tenir un discours surréaliste.

M. Jean-François Copé.C’est vraiment l’hôpital qui se fout de la charité !

M. Pierre-Alain Muet.Où étiez-vous, monsieur le Premier ministre, quand la France a augmenté sa dette de 10 % du PIB entre 2002 et 2007 ? Où étiez-vous quand la France a connu, pendant pratiquement cinq années, un déficit excessif que les chiffres officiels évaluent à près de 3 % ? Où étiez-vous quand les dépenses publiques et les prélèvements obligatoires ont augmenté ? Au Gouvernement !

Il est au moins un point sur lequel je vous donne raison : vous avez bien fait de citer l’exemple des politiques des gouvernements de gauche étrangers, qui ont réduit la dette et les déficits. Mais regardez notre pays : en vingt ans, la dette n’a diminué qu’entre 1997 et 2002, sous le gouvernement Jospin. C’est la seule période pendant laquelle les déficits publics ont été réduits massivement. Ils étaient – selon l’audit – de 3,5 % en 1997 ; à la fin de l’année 2001, nous les avions abaissés à 1,5 %. Et qu’a fait le Gouvernement auquel vous avez participé durant la période qui a suivi ? Il a laissé dériver la dette et les déficits.

Votre discours sur la maîtrise des dépenses publiques et l’efficacité de la politique publique est, je le redis, surréaliste. Nous, nous avions su réduire les déficits, diminuer la dette et relancer la croissance. Vous prétendez souvent que nous avions la chance de bénéficier de la croissance, mais, à cette époque-là, nous l’avons bel et bien construite, au contraire. Je vous rappelle en effet qu’entre 1997 et 2002, la croissance mondiale était bien inférieure à ce qu’elle a été depuis. Elle s’élevait alors à 3 %, alors qu’elle est montée à près de 5 % dans les années qui ont suivi.

...Le débat sur la révision générale des politiques publiques, qui nous réunit, aurait pu permettre une réflexion intelligente sur celles-ci. Nous aurions pu utiliser les audits de modernisation pour savoir dans quels secteurs on pouvait réaliser des économies ou quels étaient ceux dans lesquels il fallait en priorité redéployer des crédits. Mais vous avez transformé cet exercice en un simple plan de rigueur aveugle et brutal.

M. Hervé Mariton.Oh là là !

M. Pierre-Alain Muet.En résumé, depuis neuf mois, vous êtes passés de la dépense injuste et désinvolte du début de l’été – j’y reviendrai – à la rigueur aveugle et brutale de la fin de l’hiver. Si aujourd’hui, vous nous proposez des coupes claires, c’est parce que vous avez inscrit la révision générale des politiques publiques dans la recherche d’un objectif absurde : le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

... Certes, il faut réfléchir aux missions de service public et, pour notre part, nous sommes favorables à l’intervention et à l’efficacité publiques.

...J’ai rappelé que nous avons réduit les déficits, vous n’avez donc aucune leçon à nous donner dans ce domaine. Si un gouvernement peut en parler, c’est celui qui les a réduits en son temps ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

M. Jean-François Copé.Vous avez mauvaise mémoire ! Vous nous avez légué 49 milliards de déficit en 2002 !

...

M. le président.Ne vous laissez pas interrompre, monsieur Muet !

M. Pierre-Alain Muet.Vous savez fort bien que nous avons réduit le déficit des finances publiques fin 2001 à 1,5 % du PIB !

M. Jean-François Copé.Dans vos rêves !

M. Pierre-Alain Muet. Je maintiens, monsieur Copé, que le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux est un objectif tout à la fois absurde et insultant. Notre fonction publique est particulièrement efficace et beaucoup de pays européens nous l’envient.

Il y a une seconde raison pour laquelle vous êtes conduit aujourd’hui à prévoir un plan de rigueur, monsieur le Premier ministre : vous avez créé la dérive budgétaire vers un déficit excessif par une politique économique inconséquente et incohérente. Nous savons tous que notre pays est en train de glisser – c’est un des scénarios évoqués par le rapporteur général au cours de la discussion budgétaire – vers un déficit important. Ce scénario montrait que, si la croissance ne dépassait pas 2 % en 2007 et 2008, nous franchirions la barre des 3 %. Voilà ce qui vous conduit à cette politique de rigueur brutale !

Après un débat d’où s’est dégagé un certain consensus sur les grandes priorités de notre pays, vous leur avez carrément tourné le dos. Souvenez-vous : pendant la campagne présidentielle, les trois principaux candidats se sont accordés à dire que notre pays avait trois objectifs à atteindre : réduire les déficits, investir massivement dans l’éducation et la recherche, redonner du pouvoir d’achat aux Français. Tout le monde savait dès l’été que les prix augmentaient fortement et qu’il fallait donner au pouvoir d’achat aux plus modestes. Vous avez refusé de le faire. Vous avez refusé de revaloriser le SMIC. Vous devrez pourtant y venir, automatiquement, du fait de la hausse des prix.

...Vous avez refusé d’augmenter la prime pour l’emploi ; en contrepartie, vous avez dilapidé 15 milliards d’euros dans une politique aussi absurde qu’inefficace. Quant à l’effort d’investissement dans l’éducation, l’enseignement supérieur et la recherche, vous les aviez renvoyés au budget de l’automne, où les moyens manquaient déjà.

...Dans le projet de loi de finances, vous avez annulé 7 milliards d’euros de dépenses…

M. le Premier ministre. Pas du tout ! Et pourquoi ne pas dire un mot du milliard affecté à l’éducation ?

M. Pierre-Alain Muet. …de sorte que vous avez annulé, en somme, le peu que prévoyait le budget. Pourtant, quand il s’est agi de dilapider 15 milliards d’euros, vous n’avez pas hésité, sans entreprendre aucune analyse de la situation économique ni aucune étude d’impact.

Si vous aviez appliqué la révision générale des politiques publiques au paquet fiscal, vous n’auriez retenu aucune des mesures qu’il contient ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Quand le Président de la République était ministre des finances, il avait déjà demandé à ses services d’évaluer les mesures du paquet fiscal, les heures supplémentaires et les exonérations d’intérêts d’emprunts. Ils lui avaient répondu qu’on ne pouvait mettre sur pied une telle usine à gaz, dont les effets sur l’emploi seraient incertains et le coût pour les finances publiques exorbitant.

...Nous avons pu le vérifier grâce à l’étude de M. Migaud. Mais vous le saviez : si vous aviez appliqué les bonnes méthodes d’une révision générale des politiques publiques, vous n’auriez retenu aucune des mesures du paquet fiscal.

Je vous le dis, monsieur le Premier ministre : la RGPP telle que vous la pratiquez aujourd’hui n’est pas une révision générale des politiques publiques, mais une rigueur généralisée pour le peuple,…exception faite des plus fortunés de nos concitoyens, qui, eux, ont bénéficié des cadeaux de l’été et qui sont aujourd’hui épargnés. Ce que vous avez produit, avec vos neuf mois de politique économique, c’est un effondrement de la confiance de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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