Pouvoir d’achat : l’agitation et les expédients tiennent lieu de politique

23
Sep
2008

Le gouvernement ne cesse d’empiler des lois « bidon » sur le pouvoir d’achat. Il aurait suffit pourtant d’augmenter le SMIC et la prime pour l’emploi, et de donner dès le début de la législature un signal aux partenaires sociaux par une conférence tripartite sur les salaires pour lancer les négociations salariales et éviter ce que nous connaissons depuis un an : une baisse du pouvoir d’achat des salaires.

Mais « ce que nous propose le gouvernement c’est une fois de plus, une fois encore, un expédient…. Monsieur Bertrand, vous êtes le ministre des expédients …. Demander aux salariés de « liquider leur épargne de participation pour boucler leur fin de mois, c’est leur demander de bruler leurs meubles pour se chauffer aujourd’hui… C’est demander aux Français de faire ce font que tous les gouvernements de droite successifs font depuis 2002 dans la gestion des finances publiques : financer des dépenses courantes en s’endettant. Ce n’est pas la meilleure façon de créer la confiance ! » (intervention en séance)

Interventions de Pierre-Alain Muet à l'Assemblée nationale

Revenus du travail

Deuxième séance du mardi 23 septembre 2008

Discussion des articles

Article 1er (suite)

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M. le président.La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Monsieur le ministre, notre pays traverse une grave crise de confiance, qui se traduit dans tous les indicateurs. Ainsi, selon l’INSEE, la confiance des Français dans la situation économique n’a jamais été aussi basse depuis vingt-cinq ans.

Nous savons tous que cette crise de confiance repose sur une réalité, c’est que le pouvoir d’achat de nos concitoyens a baissé au cours de la dernière année. Le pouvoir d’achat des salaires a baissé de 0,4 point, celui des retraités a baissé puisque les retraites n’ont pas été revalorisées du montant de l’inflation.

Ce que vous nous proposez, c’est une fois de plus un expédient. Vous êtes en quelque sorte le ministre des expédients.

Vous avez commencé il y a un an à expliquer que, pour augmenter le pouvoir d’achat, il fallait monter cette usine à gaz sur les heures supplémentaires. Résultat, on le sait très bien aujourd’hui, un certain nombre de salariés ont pu faire des heures supplémentaires et ont été rémunérés, mais, en contrepartie, les entreprises, au lieu d’embaucher, ont fait faire des heures supplémentaires et, pour la première fois depuis longtemps, l’emploi a chuté dans notre pays au deuxième trimestre de cette année. Au total, la masse salariale n’a pas augmenté. Au total, le pouvoir d’achat des familles a baissé.

Aujourd’hui, vous nous proposez encore un expédient. Au lieu d’augmenter les salaires, vous proposez un crédit d’impôt au profit des entreprises concluant un accord d’intéressement, rendant possible, pour les salariés qui auront la chance d’être dans ces entreprises, le versement d’une prime d’intéressement.

Quelle sera la contrepartie ? Il se produira, de même que pour les heures supplémentaires, un effet de substitution : certains salariés bénéficieront de dispositifs d’intéressement au détriment d’une augmentation globale des salaires. Si le Gouvernement souhaitait réellement soutenir le pouvoir d’achat des Français, il aurait commencé par augmenter le SMIC, parce que ce sont les salariés au SMIC qui souffrent les premiers de l’inflation. Il aurait, comme nous le demandons dans tous les débats, augmenté la prime pour l’emploi, perçue par neuf millions de salariés. Il aurait, enfin, fait en sorte que la négociation sociale soit saisie du sujet ; un de nos amendements consiste précisément à ce que la commission de la négociation collective s’en saisisse.

Vous avez fait voter quatre lois sur le pouvoir d’achat, dont aucune ne traite du fond du problème. Il faut arrêter de conduire une politique économique d’expédients, qui n’a aucun effet et, faute d’être crédible, nuit même profondément à la confiance, facteur fondamental du développement économique. Avec une politique aléatoire, faite de « mesurettes » dépourvues de cohérence, vous ruinez la confiance de ce pays, sans répondre à la vraie question, qui est le pouvoir d’achat de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Troisième séance du mardi 23 septembre 2008

Discussion des articles (suite)

Article 2

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M. Pierre-Alain Muet.Monsieur le ministre, lors de notre discussion sur l’article 1er, j’ai eu le sentiment que votre politique se réduisait à une succession d’expédients. Cependant l’article 2 me fait dire qu’il y a une cohérence entre ce que vous entreprenez ici et ce que vous avez fait depuis que vous êtes au pouvoir.

Si l’on demande aux Français comment augmenter le pouvoir d’achat, ils répondront très simplement qu’il suffit d’augmenter les salaires, de laisser se développer la négociation et de donner un coup de pouce au SMIC. C’est ce qu’ont fait tous les gouvernements, de gauche ou de droite ; cela correspond à la logique et à l’efficacité économique.

Vous n’avez pas choisi cette piste et vous n’avez pas hésité, en juillet 2007, à engager des dépenses pour les plus fortunés de nos concitoyens. Vous avez procédé à des allégements fiscaux et appliqué ce que les idéologues conservateurs des années Reagan et Thatcher appellent la politique du ruissellement, laquelle consiste à déverser de l’argent sur les plus riches, dans l’idée que cela finira bien par déborder sur l’ensemble de nos concitoyens. Puis, quand il s’est agi de donner du pouvoir d’achat à tout le monde, vous avez déclaré que l’État n’avait plus les moyens et qu’il fallait se serrer la ceinture.

Vous proposez ici aux salariés la même politique que celle que vous conduisez en matière de financement public, à savoir le sacrifice du long terme au court terme. Vous n’avez pas les moyens, c’est simple : vous avez froid, brûlez vos meubles ! Vous avez besoin de pouvoir d’achat, utilisez votre épargne !

Voilà votre politique ! Depuis 2002, non seulement la France frôle le déficit excessif, mais la politique de la droite consiste à endetter l’État pour financer non pas les investissements mais les dépenses courantes. Et vous dites aux salariés privés d’augmentation de salaire de faire comme vous, c’est-à-dire de liquider leur épargne à moyen et long terme pour faire face aux dépenses courantes.

Nous allons ainsi droit dans le mur. Vous choisissez la plus mauvaise des politiques non seulement pour résoudre le problème du pouvoir d’achat mais aussi pour restaurer la confiance de nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)