Non à la suppression de la clause de compétence générale des collectivités territoriales

02
Jui
2010

La clause de compétence générale est un principe fondateur de la libre administration des collectivités territoriales. La supprimer constitue une formidable régression par rapport aux lois de décentralisation de 1982.

Vous trouverez dans la suite de cette note mon intervention à l'Assemblée lors du débat sur cette clause, à l'article 35 du projet de loi réformant les collectiviés territoriale.

Intervention de Pierre-Alain Muet à l'Assemblée nationale

 

Deuxième séance du mercredi 2 juin 2010

 

Réforme des collectivités territoriales

 

Discussion des articles

 

Article 35

...

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. La décentralisation, ce sont à la fois des compétences et une autonomie fiscale pour les exercer. Avec ce projet de loi, notamment l’article 35, vous réduisez les compétences des régions et des départements. Avec la réforme de la taxe professionnelle, vous avez quasiment supprimé l’autonomie fiscale des régions. Quelle formidable régression par rapport aux lois de décentralisation de 1982.

La clause de compétence générale, beaucoup l’ont rappelé sur ces bancs, est un principe fondateur de la libre administration des collectivités territoriales. En la supprimant, vous ramenez nos départements, nos régions vers une sorte d’établissement public... avec des compétences définies, spécialisées.

La capacité d’initiative des départements et des régions ne relèverait plus de l’appréciation souveraine des élus, mais des défauts de la législation, de ce qui aura été oublié dans la loi, ou d’un intérêt local que l’on devra justifier. Là encore, c’est une formidable régression.

Certes, vous avez rétabli des compétences dans le sport, la culture, le patrimoine. C’est une façon de reconnaître que lorsqu’on subventionne un établissement culturel de petite taille, cela relève entièrement de la commune, que s’il est un peu plus grand, cela relève de la commune et du département et lorsqu’il est encore plus grand, cela relève de la commune, du département et de la région. Je ne vois pas au nom de quoi, pas même au nom de l’efficacité économique, monsieur de Courson, on peut limiter géographiquement l’intérêt général, l’enfermer dans des limites strictes définies en 1789 – ou un peu après – pour les départements.

M. Charles de Courson. En 1793.

M. Pierre-Alain Muet. La plupart des projets ont un intérêt local, départemental, régional et il est parfaitement compréhensible et naturel que tous ceux qui ont un intérêt dans ce projet y contribuent.

Quant à dire, comme je l’ai entendu, que nos concitoyens ne comprendraient rien au millefeuille territorial, j’en doute. Ils comprennent sûrement mieux notre système local que notre système fiscal. ...S’il y a des changements à opérer, ce n’est donc pas forcément dans le domaine des compétences des collectivités locales.

...D’une certaine façon, vous introduisez de la défiance envers les capacités des élus locaux. Si les projets sont de compétence communale ou d’une compétence plus large, laissez faire les collectivités locales. Elles le font très bien. Pour chaque projet, elles savent s’adapter à un financement pertinent. Parfois, le financement doit comporter trois collectivités ; parfois, il doit même intégrer l’État. Cela réussit plutôt mieux en laissant faire les élus locaux qu’en voulant légiférer dans ce domaine. En bref, vous nous proposez un formidable retour du jacobinisme.

Si l’on veut davantage clarifier les compétences, on peut le faire avec la notion de chef de file, mais ce n’est pas ce que vous proposez.

Lorsque le Gouvernement, qui a mis les finances de l’État dans la situation où elles sont,… se permet de faire les poches des départements et des régions… pour financer des compétences qui lui sont propres – autoroutes, TGV –, il est particulièrement mal placé pour réduire les compétences des départements et des régions.

...Du reste, je ne suis pas le seul à le penser : j’ai entendu le même discours venant des bancs de la majorité.

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous écoutez très mal, monsieur Muet !

M. Pierre-Alain Muet. Pascal Clément, ainsi, l’a très bien dit : le projet dont vous êtes partis, et qui était peut-être très cohérent, est devenu une sorte de bateau ivre dont vous ne savez plus vous-même où il va.

Dès lors, le plus simple est de supprimer cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Michel Mercier, ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire. Rien d’excessif, rien que de très mesuré, comme d’habitude, monsieur Muet ! (Sourires.)