Un budget de la culture qui augmente enfin fortement

08
Nov
2016

Ayant plaidé inlassablement ces dernières années en faveur de la sanctuarisation des financements publics de la culture, j'ai salué dans mon rapport sur le budget de la culture leur forte augmentation programmée pour 2017. Cumulée à celle de l'année 2016, cette hausse efface les baisses des premières années du quinquennat et conduit à un budget de la culture au sens large qui dépasse enfin à nouveau le chiffre symbolique de 1 % du budget de l'État.

Ci-joint, mon pdfrapport sur le budget culture et dans la suite de cette note, mon intervention lors de l'examen des crédits de la culture.

 

Intervention de Pierre-Alain Muet sur le budget de la culture

8 Novembre 2016

Messieurs les présidents, madame la ministre

Ayant plaidé inlassablement ces dernières années en faveur de la sanctuarisation des financements publics de la culture, je salue leur forte augmentation programmée pour 2017. Cumulée à celle de l'année 2016, cette hausse efface les baisses des premières années du quinquennat et conduit à un budget de la culture au sens large qui dépasse enfin à nouveau le chiffre symbolique de 1 % du budget de l'État.

Il est indispensable – notamment en temps de crise - que l'Etat maintienne et développe une politique culturelle ambitieuse et ne se contente pas dans ce domaine d'une étroite vision budgétaire et comptable. Car les financements alloués à la culture constituent des investissements fondamentaux d'une société, au même titre que ceux consacrés au système éducatif, à l'enseignement supérieur ou encore à la recherche.

Les crédits des 2 programmes concernés par ce rapport augmentent fortement l'an prochain. La progression est de 4 % pour le programme 131 (Création) avec, comme l'an dernier, une forte augmentation du budget des arts plastiques. Quant aux crédits du programme 224, (Transmission des savoirs et démocratisation de la culture) ils augmentent de 8 %.

Cette hausse devrait contribuer à développer fortement l'éducation artistique et culturelle. Elle concerne plus de 46 % des élèves en 2016, et je souhaite qu'un objectif ambitieux soit fixé, car il s'agit là d'un enjeu éducatif majeur. Parce que les aptitudes culturelles s'acquièrent dès le plus jeune âge, parce que la créativité se forme dès l'enfance, l'école doit offrir à chaque enfant, l'accès à l'héritage culturel et à la création.

Dans le champ du spectacle vivant, l'encouragement du recours à l'emploi pérenne ou à l'allongement de la durée des contrats, grâce au fonds pour l'emploi pérenne dans le spectacle devrait favoriser le recours à l'emploi permanent dans les entreprises de spectacle tout en préservant ce que je considère comme l'un des acquis fondamentaux de l'exception culturelle française : le régime des intermittents du spectacle.

L'augmentation des crédits du programme Création permettra de rétablir la situation financière des opérateurs du spectacle vivant qui ont beaucoup souffert de l'austérité. Il permettra aussi de soutenir la création indépendante, d'améliorer la diffusion des œuvres dans les territoires les plus éloignés de la culture, et d'accentuer l'effort en faveur des jeunes publics.

J'ai soutenu dans mes précédents rapports le beau projet de la Philharmonie de Paris qui est un incontestable succès et souhaité que l'on avance sur 2 projets plus modestes mais importants : l'extension nécessaire des locaux du conservatoire national de musique et danse de Lyon et les ateliers Berthier.

Je voudrais terminer par un focus sur le CNV. Comme le CNC que vous avez bien connu madame la ministre, ce système est doublement vertueux ; la taxe collectée sur tous les spectacles, y compris dans leurs tournées anglo-saxonnes, est redistribuée aux entreprises qui développent leur activité sur le territoire national pour 2/3 en droits de tirage et 1/3 en aide sélective. Cette aide sélective est majoritairement redistribuée aux petites et très petites structures sur tout le territoire.

Au-delà du plafond de 30 millions d'euros, les recettes supplémentaires sont reversées au budget général de l'Etat. Or un tel mécanisme n'a aucune justification économique. Comme je l'ai rappelé pour d'autres institutions, les taxes affectées ne sont pas des impôts d'État, mais correspondent à un système vertueux de mutualisation du financement de la création par les usagers du secteur. Ces recettes excédentaires n'ont donc aucune raison d'aller au budget général.

Et surtout ce plafonnement a un effet pervers. En l'absence de plafond, 3 Millions de recettes supplémentaires génèreraient 2 Millions de droits de tirage et 1 Million d'aide sélective aux petites structures. Si ces 3 Million dépassent le plafond, c'est l'Etat qui empoche indument cette recette, mais le CNV lui, doit néanmoins débourser 2 Millions en droits de tirage. Le résultat est un déficit de 2 millions pour le CNV et aucune aide pour les structures émergentes. Ce plafonnement si cher à l'administration du budget est une absurdité économique et une aberration financière.

Les missions du CNV ont été récemment accrues et il devient progressivement la maison commune du monde de la musique, du spectacle vivant et de la filière musicale. C'est pourquoi je souhaite que la réflexion se poursuive pour que le CNV devienne pour l'ensemble du spectacle vivant ce qu'est le CNC pour le cinéma.

On reconnait aujourd'hui que la longue période d'austérité budgétaire qui plongea l'Europe dans la récession fut une erreur économique majeure. Mais appliquée à la culture, cette austérité fut encore plus absurde, car la baisse des crédits fut une goutte d'eau dans l'océan des déficits, et ses effets furent parfois dramatiques, notamment sur les petites structures qui contribuent à la richesse de notre écosystème culturel.

Parce que l'art contribue de façon majeure au patrimoine d'une nation et en est le ciment le plus fondamental, c'est un investissement encore plus indispensable en temps de crise. C'est pourquoi je ne peux que me réjouir de voir enfin corrigés les errements passés.