12
Oct
2014

Dans cet entretien avec Hubert Huertas et Laurent Mauduit de Médiapart, je plaide pour que le gouvernement de Manuel Valls mette en cohérence la politique nationale avec un diagnostic qui reconnaît - enfin - que la récession résulte de l'effondrement de la demande dû aux politiques massives d'austérité conduites dans l'ensemble de l'Europe.

 

 

Pierre-Alain Muet est tout le contraire d'un ultra. Très jeune, en 1983, il approuve le virage économique de François Mitterrand. À partir de 1997, il conseille Lionel Jospin à Matignon. En 2007, Pierre-Alain Muet soutient Ségolène Royal, et en 2012, après avoir travaillé avec Martine Aubry pendant la primaire, il rejoint François Hollande devenu « le » candidat. Autant dire que Muet est d'abord légitimiste.

Or ce social-démocrate, qui ne rêve que d'unité du PS et de la gauche en général, est devenu un « frondeur » malgré lui. Après avoir signé l'appel des 100 en faveur d'un changement de politique économique, il n'a pas voté le pacte de responsabilité, et pas davantage le budget de la Sécurité sociale. Et quand on lui demande s'il a soudainement viré à gauche, il répond que c'est le gouvernement qui est allé à droite.

Son diagnostic est implacable : « François Hollande a dit au mois d'août qu'il y a un problème de demande dans toute l'Europe, et que c'est la conséquence des politiques d'austérité conduites depuis plusieurs années. Très bien ! Mais il termine en disant : "Mais nous continuerons notre politique de l'offre." Il y a une divergence profonde entre le discours qu'il a tenu et la politique qui est conduite en France. »

02
Oct
2014

Retrouvez ci-dessous mon interview sur le budget et l'orientation de la politique économique, ce jeudi 2 octobre sur RFI.

01
Oct
2014

Vous pouvez écouter ci-dessous mon intervention à la Fête de la Rose des Landes sur la crise et la politique économique en France et en Europe.

 

 

Dans ce discours, je reprends le fil de la crise depuis son éclatement en 2008 jusqu'à aujourd'hui pour expliquer que le programme sur lequel nous avons été élus était le bon chemin pour répondre à la crise. Et s'il fallait y ajouter une mesure raisonnable sur la compétitivité, il n'y avait aucune raison de programmer 41 milliards d'allègements, mal calibrés, mal ciblés, mal évalués, obligeant à faire une politique d'austérité avec 50 milliards de réduction des dépenses sur 3 ans. Une politique qui reproduit le cocktail – baisse des dépenses/baisse du coût du travail – qui a plongé l'Europe dans la récession et au bord de la déflation.

Face à l'effondrement de la demande, il fallait revenir à l'objectif d'inverser rapidement la courbe du chômage en agissant sur l'apprentissage et sur les emplois d'avenir.

En conclusion, j'invite les socialistes à ne pas se tromper d'époque. « La modernité du socialisme, ce n'est pas Blair et Schroeder. La modernité du socialisme, ce n'est pas d'adapter notre idéal de solidarité à une mondialisation libérale qui a échoué. Ce sont les inégalités qui ont engendré les dérives financières qui ont conduit à la crise. Ce sont les égoïsmes nationaux qui ont conduit à la crise de la zone Euro. Alors n'ayons pas peur, nous, socialistes, de ce que nous sommes. Car le principe de solidarité que nous portons depuis toujours est la seule et la vraie réponse à la crise d'aujourd'hui. »

19
Sep
2014

J'ai développé sur TLM mon analyse de la situation économique et politique.

Lors de son interview dans le Monde le 20 Août, le président de la république a marqué un tournant dans son analyse de la situation économique en reconnaissant que « le diagnostic est implacable : il y a un problème de demande dans toute l'Europe... C'est essentiellement dû aux politiques d'austérité menées depuis plusieurs années ». S'il a demandé qu'il y ait un changement de politique économique en Europe, il a réaffirmé son souhait de continuer dans notre pays une politique de l'offre.

Or, on ne sort jamais d'une récession par une politique de l'offre pour la bonne raison qu'une récession, c'est toujours la conséquence d'un ralentissement ou d'une baisse de la demande. Et là, ce n'est pas un ralentissement, c'est un effondrement de la demande dans tous les pays européens. Certes, il fallait prendre des mesures pour la compétitivité, mais les 20 milliards du CICE étaient largement suffisant. Faire 41 Milliards d'allègements sur les entreprises et les financer par une réduction massive des dépenses publiques, c'est incohérent dans la conjoncture actuelle.

Ce cocktail - baisse du coût du travail et coupes massives dans les dépense publiques - qui peut à la rigueur réduire les déficits publics et redresser la compétitivité quand un pays est seul à le faire - a finalement conduit l'Europe dans la dépression et au bord de la déflation. Le résultat est que l'on rate les 3 cibles que l'on se fixait : le chômage augmente, le déficit public ne se réduit pas, l'impact sur le déficit extérieur est très faible et comme on approche de la déflation, la dette explose. C'est la réplique 80 ans plus tard de ce qui s'était déjà passé dans les années 30 avec les politiques de déflation en Europe.

 

16
Sep
2014

J'ai voté la confiance au gouvernement car il s'agit d'un vote qui porte sur l'ensemble de la politique du gouvernement et qui, pour moi, traduit l'appartenance à une majorité. Par ailleurs, le discours de politique générale du premier ministre était, comme je le souhaitais, « rassembleur ». Ce vote positif n'arrête pas pour autant le débat sur la politique économique au sein de la majorité.

Ci-joint, mon intervention sur LCI à la suite du vote :

 

 

11
Sep
2014

Retrouvez ci-dessous un article paru dans l'édition du 11 septembre de Libération:

pdfProfil - Libération 11/09/2014 (pdf).

 

Profil: Pierre-Alain Muet, frondeur malgré lui.  (Par Nathalie Raulin).

Economiste chevronné et modéré, ex-conseiller de Jospin, cet élu lyonnais a lutté durant deux ans en coulisses contre une politique de l'offre «absurde». Et se retrouve à faire cause commune avec l'aile gauche du PS.

Frondeur, Pierre-Alain Muet? Il y a encore six mois, pas un ténor socialiste n'aurait prédit que le vice président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, macro-économiste chevronné et ancien conseiller économique de Lionel Jospin, puisse faire un jour cause commune avec des députés pour la plupart issus de l'aile gauche du parti. François Hollande, dont ce néokeynésien partage les convictions mendésistes, moins que quiconque. Muet le modéré est entré en résistance. Signataire début avril de l'appel des 100. Abstentionniste fin avril sur le «pacte de responsabilité» puis, mi-juillet, sur le budget de la Sécu. Pourvoyeur de tribunes réquisitoires contre le virage économique acté le 14 janvier par le chef de l'Etat. Frondeur donc. «Je récuse ce terme dont on m'affuble aujourd'hui simplement parce que je dis ce que j'ai toujours dit, proteste le député. Mais je ne vais pas remettre en question quarante ans de publications et d'enseignement au prétexte que je suis dans une majorité», s'insurge-t-il. Et d'ajouter, accablé: «Quand le gouvernement glisse complètement à droite, jeme retrouve à gauche...»

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10
Sep
2014

La poursuite de la récession européenne conduit à un déficit public qui ne se réduit pas en France en 2014, comme vient de l'annoncer le Ministre des finances et du budget Michel Sapin.

Dans cette situation, le Gouvernement a raison de reporter à 2017 la réalisation de l'objectif de 3% pour ne pas ajouter de nouvelles mesures d'austérité à une stagnation, due, comme l'a rappelé le président François Hollande le 20 août, à "un problème de demande dans toute l'Europe ....résultant des politiques d'austérité menées depuis plusieurs années".

Je salue notamment le fait que la hausse de la TVA, parfois envisagée, ait été écartée.

En revanche, faut-il continuer à programmer 41 milliards d'allègements sur les entreprises dont les effets n'apparaîtront qu'à long terme, en maintenant en contrepartie l'objectif de réduction de dépenses dont l'effet dépressif est immédiat ? Cela ne semble guère réaliste au regard des réductions de dépenses réalisées antérieurement et encore moins optimal pour retrouver rapidement la croissance.

Dans cette conjoncture, il serait plus efficace d'augmenter plus fortement les emplois d'avenir et l'apprentissage et de soutenir l'investissement des collectivités locales qui est en train de s'effondrer.

 

09
Sep
2014

Au moment où le parallélisme entre les crises de 1929 et de 2008 se prolonge de façon inquiétante en Europe, un retour sur la politique économique de l'homme dont les réformes révolutionnèrent l'Amérique et changèrent le cours de l'histoire est riche d'enseignements pour lutter contre la crise actuelle. Dans un article du numéro spécial de la revue Pouvoirs consacré à Roosevelt, j'analyse les trois changements qu'impulsa Roosevelt - régulation financière, réduction des inégalités, développement de l'intervention publique, dont la généralisation après la seconde guerre mondiale conduisit à la longue période de prospérité de l'après-guerre et qui restent aujourd'hui les réponses pertinentes à une crise née de trois décennies de libéralisme et de dérégulation.

Je souligne aussi le courage politique d'un homme issu de la grande bourgeoisie qui sut affronter la haine des grands patrons et des banquiers d'affaires, qui ne lui pardonnèrent ni l'imposition des grandes fortunes ni la régulation des banques et des marchés financiers. Une leçon à méditer quand dominent en Europe les lobbys bancaires et patronaux et une forme de « pensée unique » qui n'a rien appris de 6 années de crise.

pdfRoosevelt face à la crise

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24
Juil
2014

Vous pouvez lire ci-dessous mon article paru dans l'édition de juillet de L'Economie Politique

Le sujet de ce numéro spécial « qu'est-ce qu'une politique de gauche ? » n'est pas anodin. Depuis plusieurs mois et pour certains depuis plus d'un an, un grand nombre d'électeurs de François Hollande sont désemparés et se demandent où les mène la politique économique conduite par le président de la République et son gouvernement. Les 60 propositions étaient-elles inadaptées à la situation économique, comme ce fut le cas en 1983 quand la gauche dut prendre le tournant de la rigueur ? Pour avoir analysé à 30 ans de distance les politiques économiques des deux périodes, je ne le pense pas[1]. Ce qui était vrai de la relance contrariée de 1981 ne l'est pas de la politique économique mise en oeuvre à la suite du discours du Bourget et des 60 propositions de François Hollande. Ces propositions étaient et restent la réponse pertinente à la crise même s'il y manquait des mesures sur la compétitivité, et même si la durée de la récession européenne avait été sous-estimée. Cela ne justifiait aucunement d'oublier à la fois la demande et des mesures phares du programme présidentiel comme la réforme de l'imposition des revenus, pour faire de la politique de l'offre l'alpha et l'oméga de la nouvelle politique économique d'un gouvernement socialiste.

[1] Sur la politique des années Mitterrand : Alain Fonteneau et Pierre-Alain Muet « La gauche face à la crise » Presses de Sciences-Po, 390 pages, novembre 1985, et sur la première année de la politique de François Hollande ; Pierre-Alain Muet  « Le bon chemin, La politique économique de la gauche mise en perspective », Fondation Jean Jaurès, 118 pages, juin 2013.

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03
Juil
2014

Dans mes interventions sur le projet de loi de finances rectificatif et sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais également à l'occasion d'un long entretien en tête à tête avec le Président de la république, j'ai plaidé pour rééquilibrer le pacte de responsabilité afin que notre politique économique marche sur deux jambes : aux mesures structurelles en faveur des entreprises dont les effets n'apparaîtront qu'à long terme et qui devraient être mieux calibrées, il convient d'ajouter des mesures conjoncturelles (accélération de l'apprentissage, développement des emplois d'avenir, soutien à l'investissement), seules susceptibles de sortir rapidement notre économie de 3 années de récession due à l'effondrement de la demande en Europe.

La situation conjoncturelle est très particulière : après avoir redémarré à la fin de l'année dernière, l'économie française connaît un replat qui risque, comme l'INSEE vient de le rappeler, de se prolonger du fait de la faiblesse persistante de la demande. Dans cette situation où la reprise dépend essentiellement du redressement de la demande, c'est l'emploi qui fait la croissance. Tant que la croissance n'est pas suffisante pour créer des emplois, c'est en effet la création volontariste d'emploi qui enclenchera le cercle vertueux où croissance et emploi se confortent mutuellement. Deux exemples passés, l'un à gauche, l'autre à droite, montrent la pertinence de ce type de politique. En 1997, sous le gouvernement de Lionel Jospin, ce sont les emplois jeunes qui ont déclenché la reprise économique, et quand la croissance est revenue, l'emploi du secteur privé a fortement augmenté. En 2006, une politique comparable a été mise en œuvre par Jean-Louis Borloo avec les mêmes résultats. C'est pourquoi il est indispensable de revenir à l'objectif d'inverser le plus rapidement possible la courbe du chômage par une action massive sur les emplois aidés. Un emploi d'avenir pour un jeune c'est un revenu supplémentaire et donc des débouchés pour les entreprises, et c'est de la confiance pour les familles.

Dans le prolongement de ces réflexions, j'ai déposé deux amendements, l'un pour augmenter fortement les emplois d'avenir (vidéo ci-dessus), l'autre pour accélérer la montée en charge de l'apprentissage (vidéo ci-après). Leur financement - très modeste au regard de l'ampleur des allègements - pouvant être assuré par exemple par la suppression d'allègements parfaitement inefficaces tels que la suppression de la C3S.

Ces amendements n'ont pas été adoptés. Il n'en demeure pas moins qu'un effort massif sur les emplois d'avenir et l'apprentissage reste le chaînon manquant de la politique du gouvernement et la clef de la reprise économique.

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